Regards croisés sur le métier de médecin de l’Éducation nationale
Découvrez le métier de médecin de l’Éducation nationale à travers l'interview de Maria et Simon. Plongez dans le quotidien de ces professionnels engagés qui œuvrent pour la santé et la réussite des élèves.
1/ Pouvez-vous, en quelques mots, nous décrire votre parcours ?
Maria : J’ai toujours voulu être médecin et travailler avec des enfants ! Cependant, j’ai commencé ma carrière à l’hôpital auprès de personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Mais il y a un lien entre ces deux publics : leur vulnérabilité. Un jour, des collègues médecins de l’Éducation nationale m’ont demandé si je souhaitais les rejoindre. J’ai saisi cette opportunité, d’abord en qualité de contractuelle puis de titulaire après avoir réussi le concours en 2012. J'exerce dans les écoles primaires d'une commune de 60 000 habitants, et depuis 2022 nous avons créé, avec des collègues, un centre médico- scolaire où nous recevons les collégiens et lycéens de quatre communes avoisinantes.
Simon : Après mes études, j’ai commencé ma carrière par des remplacements dans des cabinets de médecine générale. J’ai découvert le métier de médecin de l’Éducation nationale par hasard en répondant à une annonce passée par le médecin conseiller technique départemental des Hauts-de-Seine sur un site internet consulté par les médecins remplaçants. Je me suis lancé dans l’aventure de la médecine scolaire pour trois raisons : concentrer mon activité auprès de la population des enfants et des adolescents ; axer mon travail sur la prévention ; me donner davantage de temps de réflexion et de consultation par patient en comparaison de la médecine générale en cabinet. J’ai d’abord été contractuel : cela m’a conforté dans mon choix de rejoindre l’Éducation nationale. J’ai obtenu le concours l’année suivante. Depuis dix ans, j’exerce dans un centre médico-scolaire des Hauts-de-Seine.
2/ Le médecin de l’Éducation nationale a de nombreuses missions dont certaines sont parfois méconnues. Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?
Maria : L’axe de la prévention est vraiment notre boussole. Dans ce cadre, nous dépistons des troubles du neurodéveloppement, notamment lors de la visite en grande section de maternelle. Nous nous posons des questions comme : « Comment l’élève vit-il et étudie-t-il avec sa pathologie, son handicap ? Que devons-nous mettre en place pour lui permettre de s’épanouir et de réussir sa scolarité ? ». Nous pouvons ainsi proposer aux équipes éducatives des protocoles d'urgence pour des maladies somatiques et des aménagements pédagogiques. Nous vérifions également que les élèves en lycée professionnel en contact avec des machines ou des environnements à risque sont aptes à suivre leur formation. Évidemment, nous accueillons tout élève à sa demande, celle de ses parents ou de l’équipe éducative.
Simon : En fonction des situations et des zones d’exercice, nos missions évoluent. Ces dernières années, même si la priorité reste les écoles primaires, les médecins scolaires ont fait face à la majoration de la souffrance psychique des jeunes. Je m’occupe particulièrement des situations d’absentéisme pour raison médicale pouvant mener au décrochage scolaire. Par ailleurs, comme chez le médecin généraliste, une consultation comporte un interrogatoire et un examen physique. Le dépistage des troubles sensoriels est quasi-systématique (bilan visuel et auditif). Nous testons également le langage et la motricité. Nous sommes sollicités avant la mise en place d’un PAP (plan d’accompagnement personnalisé) et étudions les PAI (projet d'accueil individualisé) dans le cadre des pathologies chroniques. Le médecin de l'Éducation nationale est aussi conseiller technique en matière de santé auprès des directeurs d’école. Par exemple, en cas de maladie contagieuse, nous leur indiquons si des mesures sont à prendre dans la collectivité.
3/ Parmi tous les enjeux de votre profession, sur lesquels souhaiteriez-vous insister ?
Maria : Il nous faut orienter au mieux des familles dans notre système médical car certaines le connaissent parfois mal. Sur mon secteur, je travaille notamment avec des élèves issus de classes UPE2A (classe pour élèves nouvellement arrivés en France, dont la langue maternelle n'est pas le français) qui ont des besoins particuliers, tout comme les élèves en situation de handicap. Pour être efficace, nous devons travailler en équipe, notamment avec les infirmiers/infirmières de l'Éducation nationale, et en synergie avec les médecins de ville, les spécialistes, les partenaires extérieurs… Nous dialoguons aussi beaucoup avec les familles. Face à une précarité parfois importante, nous avons un rôle à jouer pour permettre à l’élève de se sentir le mieux possible. Enfin, la prévention de l’absentéisme et les questions de santé mentale sont actuellement des enjeux importants.
Simon : Pour favoriser l’intégration en milieu scolaire des enfants atteints d’un trouble du neurodéveloppement ou en situation d’absentéisme médical, un bon climat scolaire est primordial. Le médecin de l'Éducation nationale peut participer à améliorer l’accueil de cet élève en expliquant aux équipes, avec l’accord de l’élève et de sa famille, la pathologie. Pour cela, établir un lien de confiance avec l’élève, sa famille et l’ensemble de l’équipe est primordial. Il faut forcément aimer communiquer ! Je dirais en outre que la plus-value du médecin de l'Éducation nationale par rapport au médecin traitant de l’élève, c’est d’avoir à la fois des connaissances médicales et des connaissances du fonctionnement d’un établissement scolaire.
4/ Quelles satisfactions retirez-vous de ce métier ?
Maria : C’est un métier de contact : contact avec les enfants et les jeunes, contact avec leur famille, contact avec les équipes éducatives, contact avec nos partenaires… Tous les jours, je suis étonnée et admirative devant la capacité de résilience des enfants. Quotidiennement, la variété des missions et des pathologies rencontrées, ainsi que le travail en équipe, une certaine autonomie et une liberté d’organisation dans notre travail sont également des points forts. En outre, nous sommes les « conseillers techniques » des équipes et avons un impact concret : nous sommes les seuls médecins à pouvoir, par exemple, proposer un rendez-vous à un patient (c’est-à-dire l’enfant, avec l’accord de sa famille). Par ailleurs, il est enrichissant de pouvoir agir dans le domaine de la prévention et sur le temps long, puisque nous intervenons de la maternelle au lycée.
Simon : Le travail en équipe ! Dans les Hauts-de-Seine, nous travaillons en bonne intelligence. Nous sommes soudés, nous écoutons le point de vue de chacun : l’esprit est presque « familial » ! Je dirais aussi que nous sommes reconnus, en tant que médecin, pour notre expertise, auprès des équipes éducatives et des familles. Par exemple, si un enseignant pense qu’un élève a un trouble de l’apprentissage, il peut faire appel au médecin pour encourager le recours aux soins. Enfin, exercer dans l’Éducation nationale m’a permis de découvrir d’autres univers, d’autres professions, d’autres façons de fonctionner.
5/ Votre métier, en trois mots ?
Maria : expertise, lien, accompagnement.
Simon : réflexion, compréhension, collaboration.
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Mise à jour : janvier 2025