Une centaine d’élèves du lycée étaient présents ce vendredi 11 avril dans l’amphithéâtre du Lycée Michelet à Vanves (92) pour échanger avec Maylis de Kerangal autour de son dernier roman Jour de ressac et sur l’ensemble de son œuvre.
En présence du Recteur Étienne Champion, du DASEN des Hauts-de-Seine Frédéric Fulgence, et de personnels de l’établissement, les échanges étaient animés par Julien Coutant, directeur adjoint du cabinet du Recteur.
L’ouverture de cette rencontre par le Recteur a été l’occasion de rappeler l’inscription de cet événement dans un cycle de rencontres littéraires organisées dans différents établissements de l’académie depuis maintenant un peu plus d’un an, dont l’objectif est de promouvoir le plaisir de la lecture à tous les âges. Un moment de partage également de l’importance des lettres comme discipline scolaire, mais aussi en tant qu’art et qu’accès à la culture essentiel dans leur parcours.
De son côté, le proviseur a rappelé l’histoire du lycée qui a vu plusieurs anciens élèves devenir écrivains ou journalistes. Peut-être cette rencontre créera-t-elle de nouvelles vocations ?
Jour de ressac
Ce roman policier parfois qualifié d’anti-polar, suit la narratrice, une femme d’une cinquantaine d’année, doubleuse de cinéma, qui se retrouve mêlée à l’homicide d’un homme qu’elle ne connaît pas dans la ville de son enfance, Le Havre.
Synopsis :
« Finalement, il vous dit quelque chose, notre homme ? Nous arrivions à hauteur de Gonfreville-l’Orcher, la raffinerie sortait de terre, indéchiffrable et nébuleuse, façon Gotham City, une autre ville derrière la ville, j’ai baissé ma vitre et inhalé longuement, le nez orienté vers les tours de distillation, vers ce Meccano démentiel. L’étrange puanteur s’engouffrait dans la voiture, mélange d’hydrocarbures, de sel et de poudre. Il m’a intimé de refermer, avant de m’interroger de nouveau, pourquoi avais-je finalement demandé à voir le corps ? C’est que vous y avez repensé, c’est que quelque chose a dû vous revenir.
Oui, j’y avais repensé. Qu’est-ce qu’il s’imaginait. Je n’avais pratiquement fait que penser à ça depuis ce matin, mais y penser avait fini par prendre la forme d’une ville, d’un premier amour, la forme d’un porte-conteneurs. »
« La fiction, c’est une lentille qui permet de voir le réel »
La première partie des échanges a été marquée par une réflexion sur les liens profonds qui nous unissent aux lieux formateurs de notre enfance et adolescence. L’endroit où l’on grandit forme-t-il notre imaginaire ? Ce cadre de vie, son climat, nous impactent-ils toute notre vie ? Ces questions ont poussé Maylis de Kerangal a situé son dernier roman dans sa ville natale.
Elle explique aux élèves ne pas avoir voulu faire de ce livre un livre autobiographique, ni un livre de souvenirs. Elle a dû se détacher de son expérience, pour voir la ville autrement. « La fiction, c’est une lentille qui permet de voir le réel », et un roman policier se prêtait bien au climat social de la ville et de ses docks, où se déroulent de nombreux trafics.
Des élèves très investis
Comme à chaque rencontre littéraire, les élèves ont été acteurs de cet évènement avec la lecture à voix haute de plusieurs passages et la moitié des échanges réservés à leurs questions.
Les différentes classes présentes n’étudiant pas toutes le même roman, ce temps de questions a permis d’ouvrir les échanges sur le travail d’écrivain de manière plus général, et sur deux autres œuvres phares de sa carrière que sont Corniche Kennedy et Réparer les vivants.
Voici quelques-unes des questions auxquelles Maylis de Kerangal a pu répondre : A-t-elle fait des sacrifices pour devenir écrivaine ? La notoriété et l’obtention d’un prix littéraire ont-elles changé sa manière d’aborder l’écriture ? Laquelle de ses œuvres a été la plus marquante pour elle ? Comment se passe l’adaptation au cinéma d’un roman lorsqu’on en est l’auteur ?
Mais ce n’est pas tout : les élèves avaient également préparé quelques questions un peu plus surprenantes, la questionnant par exemple sur le choix de l’écriture comme forme d’art alors que le monde d’aujourd’hui est de plus en plus un monde d’images plutôt qu’un monde de mots.
« L’image n’est pas complètement déconnectée de la littérature car la littérature produit elle aussi des images. C’est la forme d’art la plus libre, il n’y a jamais deux lecteurs qui ont aimé (ou détesté un livre de la même manière car il y règne une forte place à l’interprétation ».
Une belle manière de conclure cette quatrième rencontre littéraire de l’académie !
Pour (re)découvrir les rencontres précédentes :
- Didier Daeninckx (autour du roman « Missak » et de la bande dessinée « Missak Manouchian, Une vie héroïque »)
- Pierre Assouline (auteur de « Le nageur »), Alex Portal (nageur quadruple médaillé aux Jeux Paralympiques de Paris 2024) et Guillaume Benoist (coach d’Alex Portal)
- Amina Damerdji (auteure de « Bientôt les vivants »)
Mise à jour : avril 2025