#11marsjelis : rencontre avec Amina Damerdji, auteure de Bientôt les vivants

Livre au bord d'une table

Dans le cadre du dispositif « 11 mars, je lis », l’académie a organisé une rencontre littéraire au lycée La Bruyère à Versailles (78).

Six classes de la seconde à la terminale étaient présentes ce lundi 17 mars dans l’amphithéâtre du Lycée La Bruyère à Versailles (78) pour échanger avec Amina Damerdji autour de son roman Bientôt les vivants.

En présence du Recteur Étienne Champion, du DASEN des Yvelines Jean-Pierre Geneviève, et de personnels de l’établissement, les échanges étaient animés par Julien Coutant, directeur adjoint du cabinet du Recteur.

Discours du Recteur

L’ouverture de cette séance par le Recteur a été l’occasion de rappeler l’importance de la lecture tout au long de la vie, de la littérature comme voix universelle car elle existe dans toutes les langues, et d’inciter les élèves à lire, à l'école et en dehors, car cela fait partie des missions de notre institution : on commence souvent à lire à l’école et on continue à l’âge adulte purement par plaisir.

 

Bientôt les vivants

Récompensé par le Prix de la littérature arabe des lycéens en décembre dernier par les élèves de l’académie, et Prix transfuge du meilleur roman français 2024, Bientôt les vivants traite de la décennie noire en Algérie dans les années 1990.

Synopsis :

« Aïcha courut à travers le village. Ses jambes tremblaient et son cœur battait si fort qu’il semblait vouloir sortir de sa poitrine. Elle connaissait le mot, dhabahine, les égorgeurs. Dhabahine, dhabahine ! »

« Algérie, 1988. Après les premières émeutes sauvagement réprimées, le mouvement islamiste montre sa puissance grandissante. La jeune Selma vit dans la proche banlieue d’Alger. Elle n’a qu’une passion, l’équitation, qu’elle pratique dans un centre non loin du village de Sidi Youcef, où se déroulera en 1997 l’un des épisodes les plus atroces de la guerre civile. Elle consacre tout son temps libre au dressage d’un cheval que tout le monde craint, tandis que les déchirements de l’histoire traversent sa famille comme toute la société algérienne : certains sont farouchement opposés aux islamistes, d’autres penchent pour le FIS, d’autres encore profitent du chaos pour s’enrichir… C’est dans ce contexte tragique que Selma apprendra à grandir, trouvant dans la relation avec son cheval et avec la nature un antidote à la violence des hommes. Bien que le martyre du village de Sidi Youcef éclaire d’une lumière terrible les trajectoires des divers personnages, ce roman reste constamment chaleureux et humain. »

 

Une fiction historique inspirée de son histoire personnelle

Amina Damerdji naît aux Etats-Unis en 1987 et vit en Algérie jusqu’à ses 7 ans, avant de fuir la guerre civile avec sa famille pour la France. Son roman raconte au contraire l’histoire d’une famille qui reste, et qui se déchire comme l’ont été la majorité des familles algériennes. La dimension autobiographique de son roman a donc été centrale dans les échanges, avec de nombreuses questions des élèves à ce sujet.

Elle a eu l’occasion d’expliquer aux élèves que si certains personnages avaient pu être à l’origine fondés sur des personnes réelles, ils restaient cependant, de leur nom à leur pshychologie, le fruit de son imagination.

En revanche tout l’univers sensoriel du livre repose entièrement sur son enfance en Algérie : les odeurs, les bruits, la langue (qui est un mélange d’arabe et de français désuet), etc.

Ce roman n’a jamais eu une vocation autobiographique même s’il lui a permis de se réapproprier son histoire. Elle confie aux élèves : « L’imagination permet d’aller vers le vrai ».

 

Des personnages aux trajectoires variées, et parfois opposées

Les échanges ont ensuite naturellement porté sur les nombreux personnages, tous avec une trajectoire différente, qui illustrent les effets réels d’une guerre civile dans une famille : quand faut-il rompre les liens avec une personne que l’on aime et avec qui on a grandi ? Quand rompre les liens pour ne pas s’abîmer soi-même ?

Au cœur de cet ouvrage, Selma, le personnage principal, est une jeune fille qui représente la jeunesse algérienne de cette époque, mais qui questionne également sur la place des jeunes femmes dans l’Algérie des années 90.

Le cheval lui, est une manière de parler du bien et du mal, et de la façon dont on a tendance à circonscrire la violence à un élément, une personne, sans chercher à en comprendre la cause. Il est le symbole que la violence travers tous les êtres vivants à cette époque.

 

Le processus d’écriture et l’accueil en Algérie

Au-delà du livre en lui-même, les élèves se sont montrés très curieux sur le processus d’écriture et l’accueil de ce roman par le lectorat algérien.

Combien de temps pour écrire un livre ? A-t-elle rencontré des difficultés à écrire ? Comment trouver de nouvelles inspirations ? Quand s’est-elle lancée dans la littérature ?

A ces questions, Amina Damerdji raconte aux lycéens que ses romans naissent toujours d’une question existentielle qui la taraude. C’est le cas ici par exemple avec l’idée de se réapproprier son histoire personnelle. Elle confie que la phase de recherches a été très difficile car après la guerre, une loi du silence a été instaurée en Algérie, et un pardon national accordé à tous. Le sujet même de ses recherches, les massacres et crimes commis, ont également été difficiles à digérer. La phase d’écriture, en revanche, a été assez rapide : quelques mois seulement, le plus gros défi étant de trouver le bon équilibre entre les différents points de vue.

Elle ne s’attendait pas à un tel succès, et en particulier en Algérie où le sujet de la guerre civile est encore très peu évoqué dans l’espace public.

 

Ces échanges ont été ponctués par des lectures de passages du livre par des élèves, et se sont conclus par une séance de dédicaces.

 

 

Cette rencontre avec Amina Damerdji s’inscrit dans la lignée des rencontres littéraires organisées en 2024 avec Didier Daeninckx (autour de son roman « Missak » et de la bande dessinée « Missak Manouchian, Une vie héroïque »), puis avec Pierre Assouline (auteur de « Le nageur »), Alex Portal (nageur quadruple médaillé aux Jeux Paralympiques de Paris 2024) et Guillaume Benoist (coach d’Alex Portal).

Mise à jour : mars 2025